Le réveil sonne, il est six heures. C’est au tour de Nathan d’être malade ce matin. Ce sera le tour de Nicolas et moi plus tard, sur la route. Dorénavant, nous nous contenterons des conserves et des pâtes, finis les produis laitiers, les œufs ou les raviolis frais.
Des hirondelles, nichées dans la cage d’escalier, viennent nous souhaiter bonne route en virevoltant dans la cuisine. Par chance, elles sentent l’appel d’air de la fenêtre et ne se prennent pas de carreau.
Thibault nous rejoint, nous rendons les clés, et nous voilà repartis. Bien sûr, c’est vent de face.
Lors de mon second relais, je me fais frôler par un SUV noir qui double en sens inverse alors que nous occupons la moitié de notre voie pour éviter les nids de poule. Il passe si proche que les petits cailloux charriés par ses pneus me piquent le torse.
Mon troisième relais est en cours lorsqu’une Chrevolet Cobalt blanche, soit la voiture qui constitue la moitié du parc automobile ouzbek, vient rabattre son rétroviseur sur mon avant bras. Je lui demande gentiment de s’arrêter mais le conducteur fait la sourde oreille et accélère, je n’arriverai pas à le rattraper. Trop occupé à l’invectiver, toujours gentiment, je n’ai pas eu le réflexe de noter sa plaque et sa voiture étant tellement commune, il sera impossible de le retrouver. Après avoir traversés les capitales géorgienne et albanaise, affrontés les conducteurs grecs et italiens, la palme des plus mauvais conducteurs revient aux ouzbeks … pour l’instant.
Un troupeau de nouveau-nés Chevrolet Damas, le taxi ouzbek, accompagnés par leur mère: un camion porte-voiture
Nous retraversons le fleuve de l’Amou-Daria. De ce côté-ci de la rive, le désert reprend très vite ses droits. Par cette traversée, nous quittons la province de Khiva pour réentrer dans le Qaraqalpaqstan, la région indépendantiste que nous traversons depuis notre entrée en Ouzbékistan où nous n’avons pas internet.
Nous sommes tellement malades qu’un arrêt nous mène droit dans un champ en jachère, le papier toilette à la main. Attirée par les vélos sur le bas côté, une voiture s’arrête. Rhabillés, nous échangeons une photo contre une bouteille de cola que nous dégazéifions pour calmer nos systèmes digestifs.
Nous évitons le zénith dans un restaurant et enchaînons les plateaux de riz. La gérante, très accomodante, ferme les rideaux et éteint la télé pour que nous puissions siester sur les banquettes.
Nous rejoignons la nationale et la qualité du revêtement s’améliore enfin. Nous longeons de nouveau la frontière avec le Turkménistan. Nouvel arrêt toilettes pour Nathan en haut d’une montée, une tempête de sable se déclenche. Un garde-frontière armé a détecté Nicolas, en train de prendre des photos, aux jumelles depuis un mirador, et vient à sa rencontre. Il lui fait effacer ses photos de la frontière qui étaient de simples photos du fleuve de notre point de vue.
La tempête de sable a ramené quelques gouttes de pluie qui ont le mérite de nous rafraîchir. Nous traversons la nationale et ne campons pas côté frontière de peur d’être à nouveau dérangés.